Editorial - Octobre 2016 - n° 185
Éric ToussirotTomographie par émission de positons en rhumatologie
Les rhumatismes inflammatoires chroniques (RIC) comprennent la polyarthrite rhumatoïde (PR), les spondyloarthrites (SpA) et le rhumatisme psoriasique (RPso). Des critères de classification sont disponibles pour chacune de ces pathologies et sont un apport pour le diagnostic qui doit être le plus précoce possible. Des examens d’imagerie sont inclus dans certains de ces critères, comme l’IRM pour les SpA axiales (SpA Ax) (1). L’évaluation des RIC reposent sur des outils cliniques et/ou paracliniques et des auto-questionnaires, bien connus des cliniciens car utilisés en routine (DAS28, ASDAS et BASDAI pour ne citer que les plus courants). L’imagerie peut également être utile pour juger de l’activité d’un RIC comme l’échographie dans la PR (2). Enfin, la prise en charge des RIC s’est considérablement modifiée ces 15 dernières années avec des stratégies tournées vers la rémission et reposant sur des concepts tel le treat to target (T2T). L’apport des biothérapies est considérable pour les RIC permettant d’obtenir la rémission ou une faible activité de la maladie pour un nombre substantiel de patients. Les facteurs de réponse aux agents biologiques sont en partie identifiés et sont une aide pour le clinicien dans le choix et l’adaptation thérapeutique dans une perspective de médecine personnalisée.
Ces différents éléments de prise en charge des RIC, diagnostic, évaluation de l’activité et traitement, ont bénéficié de nombreux progrès ces dernières années. Les technologies d’exploration progressant, nous sommes confrontés et amenés à utiliser de nouvelles techniques notamment d’imagerie, ce qui nécessite leur validation et également la détermination de leur intérêt et place dans la prise en charge d’un RIC.
Ce dossier thématique est consacré à la tomographie par émission de positons (TEP), technique d’imagerie métabolique qui visualise l’inflammation articulaire (synoviale) et périarticulaire (enthèse, gaine ténosynoviale, bourse séreuse), mais aussi d’autres structures inflammatoires (exemple vasculaire). Cette technique d’imagerie nécessite de trouver sa place dans les RIC.
Un premier article rédigé par l’équipe de Médecine Nucléaire du CHRU de Besançon (Marion Verstraete et Cécile Caoduro) permet de voir les bases physiques de cette technique et les traceurs utilisés, l’intérêt et les limites de la technique.
La TEP est une technique d’imagerie de médecine nucléaire initialement utilisée en oncologie. Elle fait appel à la mise en évidence de cellules hypermétaboliques comme les cellules néoplasiques. L’application de la TEP couplée à la tomodensitométrie (TEP-TDM) en oncologie concerne le diagnostic (positif et différentiel des tumeurs), le stade évolutif du processus néoplasique, l’évaluation de la réponse au traitement ou de la récidive du cancer. Le second article rédigé par médecins nucléaristes et oncologues (Marion Verstraete, Laura Mansi et Cécile Caoduro) passe en revue l’intérêt de la TEP pour différentes catégories de tumeurs solides et hématologiques. Le traceur couramment utilisé avec la TEP est le 18F-fluorodeoxyglucose (18F-FDG). Il permet de visualiser les cellules néoplasiques hypermétaboliques mais également les cellules inflammatoires, d’où une utilisation potentielle dans les pathologies inflammatoires (3). Ces dernières années, la TEP s’est développée dans des indications de maladies inflammatoires vasculaires (vascularite) ou granulomateuse (sarcoïdose) (4,5). L’intérêt de la TEP dans ces indications est discuté par Alexis Régent, médecin interniste.
Enfin, cette méthode d’imagerie a été utilisée dans les RIC ces dernières années (Figure 1). A l’inverse de l’oncologie (6), il n’existe actuellement pas de réel consensus quant à son usage dans la pratique courante et les données actuellement disponibles se limitent à des études pilotes ou exploratoires sur un faible effectif de patients. Le dernier ar ticle (Eric Toussirot) est consacré à l’apport de la TEP dans la PR, les SpA et le RPso.
Figure 1 : Tomographie par émission de positons chez une patiente suivie pour polyarthrite rhumatoïde avec hypermétabolisme des épaules, hanches, genoux et chevilles.
Cette technique d’imagerie qui semble prometteuse possède des qualités pour les pathologies inflammatoires (de médecine interne ou en rhumatologie) mais son utilisation en pratique quotidienne mérite d’être précisée, notamment en terme de sensibilité et spécificité (7). Pour les SpA, il se pose la question du traceur le plus pertinent à utiliser (18F-FDG ou fluorure de sodium). Ainsi, l’utilité de cette technique d’imagerie se profilera ultérieurement et elle viendra s’ajouter à la panoplie des techniques actuellement disponibles comme l’IRM ou l’échographie dans le diagnostic, l’évaluation de l’activité ou de la réponse thérapeutique des RIC.
Liens d’intérêts :
- Interventions pour les laboratoires : Abbvie, Amgen, Biogaran, BMS, Lilly, MSD, Pfizer, Roche Pharma, Roche Chugai, UCB Pharma.
- Investigateur essais cliniques phase III/IV laboratoires : Abbvie, BMS, Janssen, MSD, Pfizer, Roche Pharma, Roche Chugai, UCB Pharma
- Invitation aux congrès : Abbvie, Amgen, BMS, Janssen, MSD, Nordic, Novartis, Pfizer, Roche Pharma, Roche Chugai, UCB Pharma.
Références
1- Rudwaleit M, Landewé R, van der Heijde D et al. The development of Assessment of SpondyloArthritis international Society classification criteria for axial spondyloarthritis (part I): classification of paper patients by expert opinion including uncertainty appraisal. Ann Rheum Dis. 2009 Jun;68(6):770-6
2- Colebatch AN, Edwards CJ, Østergaard M et al. EULAR recommendations for the use of imaging of the joints in the clinical management of rheumatoid arthritis. Ann Rheum Dis. 2013 Jun;72(6):804-14.
3- Yamashita H, Kubota K, Mimori A. Clinical value of whole-body PET/CT in patients with active rheumatic diseases. Arthritis Res Ther. 2014;16(5):423.
4- Braun JJ, Kessler R, Constantinesco A et al. 18F-FDG PET/CT in sarcoidosis management: review and report of 20 cases. Eur J Nucl Med Mol Imaging. 2008 Aug;35(8):1537-43.
5- Blockmans D, de Ceuninck L, Vanderschueren S et al. Repetitive 18F-fluorodeoxyglucose positron emission tomography in giant cell arteritis: a prospective study of 35 patients. Arthritis Rheum. 2006 Feb 15;55(1):131-7.
6- Fletcher JW, Djulbegovic B, Soares HP et al. Recommendations on the use of 18F-FDG PET in oncology. J Nucl Med. 2008 Mar;49(3):480-508
7- Bruijnen ST, Gent YY, Voskuyl AE et al. Present role of positron emission tomography in the diagnosis and monitoring of peripheral inflammatory arthritis: a systematic review. Arthritis Care Res (Hoboken). 2014 Jan;66(1):120-30.